Voie privée : notion d’ouverture à la circulation générale

Principe

Une voie privée ouverte à la circulation générale est celle qui est livrée de plein gré ou laissée par son propriétaire à la libre disposition du public. La décision d’ouvrir ou de fermer une voie privée est donc de la compétence exclusive du propriétaire en application du droit de se clore résultant de l’article 647 du code civil. L’autorisation du ou des propriétaires peut résulter comme c’est souvent le cas d’un règlement de lotissement.
La détermination de l’ouverture ou non au public d’une voie privée a donné lieu à une jurisprudence abondante, car il n’existe pas de critère unique et indiscutable permettant de caractériser l’intention des propriétaires de soustraire une voie à la circulation générale. En outre, la loi du 3 janvier 1991, dite loi Lalonde, a consacré le principe de l’interdiction de la circulation des véhicules terrestres en dehors des voies ouvertes à la circulation publique (protection des espaces naturels). La violation de cette interdiction est passible d’une contravention de 5ème classe.

Jurisprudence

– Le libre passage des piétons et cyclistes ne suffit pas à caractériser l’ouverture à la circulation générale :

La compagnie des cristalleries de Baccarat était propriétaire d’une “rue” privée utilisée depuis des années avec son accord par les piétons et les cyclistes. Cette circonstance ne permet pas de regarder cette voie comme ouverte à la circulation générale. Par suite, légalité de l’installation de bornes interdisant l’accès de la rue aux véhicules automobiles.
(C.E. 18 octobre 1995, Benoit, req. 150490).

– Caractéristiques physiques de la voie privée :

Pour le juge judiciaire, la notion d’ouverture à la circulation publique est laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond (pas de contrôle de cassation).
(Cour. Cass. plénière 5 février 1988, Tedesco c/Dujmovic).

Ainsi si la voie est carrossable (chemin bitumé, empierré ou de terre mais bien entretenu), elle est présumée ouverte à la circulation publique au sens de l’article R.7 du code de la route. La présomption tombe si le propriétaire implante une barrière, des plots ou un panneau. Mais un chemin de terre mal entretenu (ornières) n’est pas ouvert à la circulation publique même en l’absence de panneaux.
(C.A. Riom 26 octobre 1993, Roudier c/ONF, req. 92.2535).

La viabilité d’un chemin est appréciée au regard des capacités d’un véhicule ordinaire et non d’un 4 X 4 ou d’un véhicule tout terrain.
Le propriétaire n’est donc pas tenu d’apposer des panneaux d’interdiction à l’entrée des sentiers.
(C.A. Chambéry 29 mars 1995, Rolin c/ministère public, commune des Déserts et fédération française de randonnée).

– Décision d’ouvrir la voie privée :

. Elle appartient aux propriétaires concernés :

Le maire ne peut pas ouvrir une voie privée à la circulation générale sans le consentement des propriétaires. En effet cette voie n’appartenait pas au domaine public car, même si le règlement du lotissement et le P.O.S. prévoyaient son incorporation au domaine public, le classement n’avait pas été effectué. En l’espèce, pour cette voie qui était toujours privée, des clôtures en interdisaient l’accès (pas de consentement des propriétaires) et la voie se terminait de plus en impasse. Même si l’arrêté créant le lotissement avait prévu le passage des véhicules d’enlèvement des ordures ménagères, de lutte contre l’incendie et d’approvisionnement en combustible et même si la commune assurait l’entretien des voies, cette double circonstance ne permettait pas de conclure à l’accord même tacite des propriétaires à l’ouverture à la circulation publique.
(C.E. 15 février 1989, Commune de Mouvaux, req. 71992).

Dès lors que les voies d’un lotissement tant qu’elles n’ont pas été incorporées dans la voirie communale appartiennent en vertu du cahier des charges aux propriétaires des lots et que selon ce même cahier seuls les acquéreurs des lots ont le droit de les emprunter, ceux-ci peuvent interdire l’accès de ces voies aux autres personnes. Par suite, le maire commet une erreur de droit en les mettant en demeure de retirer les barrières barrant l’accès à ces voies et en leur faisant obligation de les ouvrir à la circulation publique.
(C.E. 8 juin 1990, Gasparini, req. 77367).

La décision d’ouvrir ou de fermer une voie privée appartenant à la commune est une simple mesure de gestion du domaine privé qui ne met en oeuvre aucune prérogative de puissance publique.
(C.E. 27 mai 1991, commune de Périgny surYerres, req. 96591, Rec. Leb. p. 212).

Il en va de même pour un chemin communal privé situé dans une réserve naturelle.
(T.C. 24 octobre 1994, Duperray, Rec. Leb. p. 606).

Un commentaire à “Voie privée : notion d’ouverture à la circulation générale”

  1. MASSON MADELEINE says:

    Où peut-on se procurer une documentation définissant le statut de voie privée avec tolérance de passage, excluant évidemment le passage des 4 roues et des 2 roues ?
    Merci
    Madeleine Masson

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