Principe
A la différence du comptable de fait, le comptable patent est un comptable public régulièrement investi de cette fonction. Mais il peut être déclaré comptable de fait dans le cas où il aurait manié dans des conditions irrégulières les fonds d’un poste comptable autre que le sien (C.E. 4 octobre 2000, ministre de l’économie c/M. Pair, req. 196290, Rec. Leb. p. 385).
Sous réserve des dispositions relatives à l’apurement administratif, les comptes des comptables patents sont jugés en premier ressort par la chambre régionale des comptes. Le jugement des comptes produits par les comptables patents est effectué selon les modalités décrites notamment aux articles 54 à 57 du décret n 95-945 du 23 août 1995 relatif aux chambres régionales des comptes. Les jugements de la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des Comptes dont les arrêts sont soumis au Conseil d’Etat par la voie de la cassation.
En vertu de l’article 60 de la loi du 23 février 1963, les comptables publics engagent leur responsabilité pécuniaire et personnelle. Ils souscrivent une assurance pour couvrir leur responsabilité. La présente fiche examine divers cas généraux où la responsabilité du comptable a été retenue ou au contraire dégagée.
Jurisprudence
– Responsabilité encourue :
Le fait que des sommes non recouvrées aient été admises en non-valeurs ne fait pas obstacle à la responsabilité pécuniaire du comptable dès lors que les décisions administratives d’admission en non-valeurs sont intervenues postérieurement aux dates auxquelles ces sommes étaient devenues irrécouvrables.
(C.E. 6 décembre 1989, ministre du budget, req. 80492, Rec. Leb. p. 550).
Pour apprécier la validité des créances afférentes au règlement des marchés publics les comptables doivent exercer leur contrôle sur l’exactitude de l’ensemble des calculs de liquidation et notamment ceux qui résultent de l’application des règles fixées par le code des marchés publics. La responsabilité pécuniaire du comptable est engagée dans le cas où pour le calcul de la révision des prix défini par l’article 348 du code des marchés publics alors applicable, l’avance forfaitaire versée aux entreprises n’a pas été déduite de sorte que le comptable avait versé à tort une somme de 106 906 F.
(C.E. 19 juin 1991, ville d’Annecy, req. 104979, Rec. Leb. p. 242).
La responsabilité pécuniaire du comptable est engagée lorsqu’il procède au paiement de régularisation des avances consenties au régisseur qui avait payé dans le cadre d’une régie d’avances créée par la commune un intermédiaire lequel rémunérait le cachet des joueurs d’une équipe de football ou d’artistes dès lors que les pièces justificatives produites et notamment les acquits sont insuffisantes pour établir le caractère libératoire des paiements.
(Cour des Comptes, 2 mai 1996, Dame H…, comptable de la commune d’Auchel).
Sa responsabilité est aussi engagée lorsqu’il ne recouvre pas les pénalités de retard dues par une entreprise au titre d’un marché alors que l’autorité administrative compétente n’avait pas prononcé l’exonération de ces pénalités. L’attestation produite par l’exécutif de la personne publique qui n’était pas en fonction au moment des faits n’est pas prise en compte.
(Cour des comptes, 2 mai 1996, Sieur S…, comptable du district de l’agglomération agenaise).
Sa responsabilité est également encourue lorsqu’il procède au paiement de primes et d’indemnités à un collaborateur de cabinet d’un maire alors que son arrêté de nomination ne prévoyait pas le versement de tels avantages.
Si d’autres actes de la collectivité territoriale semblaient inclure cet agent contractuel dans la liste des bénéficiaires, il appartenait au comptable, chargé de contrôler la validité de la créance, de suspendre le paiement en présence de pièces comportant des éléments contradictoires.
(C.R.C. Nord-Pas-de-Calais 11 juin 1997, Mme S…, comptable de la commune d’A…).
Sa responsabilité est encore engagée lorsque des sommes correspondant à des trop-perçus sur les traitements de certains agents de la commune de Bayeux ont fait l’objet d’ordres de reversement émis par l’ordonnateur et pris en charge par le comptable mais n’ont pas été recouvrés, le comptable ne procédant pas à la compensation dans la limite de la qualité saisissable sur les traitements versées aux agents.
En effet, il appartient à un comptable public d’opérer le cas échéant une compensation entre le montant des sommes dues à un agent et le montant des sommes dues par cet agent et dont le recouvrement est poursuivi. Cette compensation ayant lieu de plein droit peut être opposée par le comptable sans qu’il soit besoin que l’ordonnateur ait rendu exécutoire l’ordre de reversement ou ait autorisé des poursuites en application de l’article R.241-4 du code des communes alors en vigueur (R.2342-4 du C.G.C.T.).
Le Conseil d’Etat confirme l’arrêt de la Cour des comptes constituant en débet le comptable alors même qu’en l’espèce le maire avait refusé d’autoriser les actes de poursuites contre les agents.
(C.E. 12 mars 1999, ministre délégué au budget, req. 182411, Rec. Leb. p. 723).
Cette responsabilité est aussi encourue lorsque le comptable procède au paiement de dépenses sur le fondement de fausses justifications du service fait dans la mesure où la fausseté de celles-ci a été reconnue par l’aveu de l’ordonnateur du caractère fictif de la certification du service fait.
(C.E. 23 février 2000, ministre de la fonction publique, req. 195153, ment. Rec. Leb.).
Si le comptable n’a pas le pouvoir se faire juge de la légalité d’un acte administratif, il lui appartient pour apprécier la validité de la créance d’exercer son contrôle sur l’exactitude des calculs de liquidation et sur la production des justifications et d’interpréter conformément aux lois et règlements en vigueur les actes administratifs qui constituent le fondement de cette créance. En l’espèce la responsabilité du comptable a été engagée pour avoir versé des indemnités horaires pour travaux supplémentaires à trois agents communaux qui, étant logés gratuitement, ne pouvaient en bénéficier.
(C.E. 8 décembre 2000, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie c/Mme Kammerer, req. 212718, Rec. Leb. p. 597).
Lorsque les pièces justificatives du service fait sont contradictoires, le comptable doit suspendre le paiement jusqu’à ce que l’ordonnateur lui ait produit les justifications nécessaires. A défaut de cette suspension, il engage sa responsabilité.
(C.E. 21 mars 2001, Morel, req. 195506, pub. Rec. Leb.).
– Responsabilité dégagée :
La responsabilité pécuniaire du comptable pour double paiement n’est pas engagée lorsque que celui-ci résulte en l’espèce de l’irrégularité commise par son prédécesseur.
(Cour des Comptes 29 février 1996, Sieur L…, comptable de la commune de Contes).