Règles contentieuses

Principe

La juridiction administrative est normalement compétente en matière de dommages de travaux publics en vertu de la loi du 28 pluviôse an VIII. Cependant la juridiction judiciaire a une compétence d’attribution dans certains cas limitativement énumérés.
Le contentieux des dommages de travaux publics obéit à des règles procédurales particulières : il est dispensé de la règle de la décision préalable. Le régime contentieux est uniforme que l’action soit engagée contre l’administration ou une personne privée telle l’entreprise qui a effectué les travaux publics.
La victime doit naturellement justifier d’un intérêt et d’une qualité pour agir.

Jurisprudence

– Juridiction compétente :

. Compétence de la juridiction administrative :

Le juge administratif est compétent pour statuer sur tous les recours formés par la victime contre toutes les personnes qui ont participé à l’exécution des travaux publics (commune, entrepreneur, concessionnaire, sous-traitant, architecte, préposés), y compris les simples particuliers autorisés à effectuer des travaux publics en dehors de tout marché ou contrat.

Ainsi en est-il pour un recours de la victime contre :

– un préposé de l’entrepreneur.
(T.C. 28 février 1977, Guigen, req. 2047, Rec. Leb. p. 663).

– un permissionnaire de voirie chargé d’exécuter des travaux publics pour le compte de l’administration.
(C.E. 19 novembre 1958, Zagouatti, req. 19026, Rec. Leb. p. 570).

Le juge administratif statue aussi sur les appels en garantie et les actions récursoires formés par le maître d’ouvrage ou l’exécutant du travail public.
(T.C. 15 janvier 1973, société Quillery-Goumy, req. 1973, Rec. Leb. p. 844).

. Compétence de la juridiction judiciaire :

* Dommages résultant des ouvrages immobiliers de France-Télécom :

Les ouvrages immobiliers de France-Télécom, personne morale de droit privé, n’ont plus la qualité d’ouvrages publics depuis le 31 décembre 1996 (loi n° 96-659 du 26 juillet 1996). Toutefois les ouvrages incorporés à un ouvrage public (tel qu’une voie publique) et qui en constituent une dépendance restent des ouvrages publics.
(C.E. Avis 11 juillet 2001, M. Adelée, req. 229486, pub. Rec. Leb.).

* Action directe contre l’assureur de l’auteur du dommage :

L’action ouverte à la victime par l’article L.124-3 du code des assurances contre l’assureur de l’auteur du dommage est distincte de son action en responsabilité contre ce dernier. Cette action directe poursuit l’exécution de l’obligation de l’assureur à la réparation du dommage. Il s’agit d’une obligation de droit privé relevant du juge judiciaire.
(T.C. 2 mai 1988, Donnay, req. 2513).

* Dommage subi par un usager d’un service public industriel ou commercial :

– lié par un contrat (service de distribution de l’eau).
(T.C. 19 février 1990, Thomas, req. 2589).

– ou non lié par un contrat.
(T.C. 5 décembre 1983, Niddam, req. 2307, Rec. Leb. p. 541).

* Dommage causé par un véhicule (loi du 31 décembre 1957) :

1°) – le dommage de travaux publics causé par un engin de chantier, lequel constitue un véhicule au sens de la loi du 31 décembre 1957, relève en cas de contentieux de la compétence du juge judiciaire.
(C.E. 19 janvier 1990, SA “équipement de bureau d’études Libor”, req. 77591, Rec. Leb. p. 1028).

2°) – de même un accident provoqué par une rotofaucheuse.
(T.C. 30 avril 2001, C.P.A.M. de Seine-et-Marne, req. 3245).

* Dommage causé par une personne privée :

– en vertu d’une permission de voirie à raison de travaux exécutés pour le compte d’un particulier.
(C.E. 26 février 1975, CPAM d’Indre-et-Loire et Bougeon, req. 92187, Rec. Leb. p. 156).

– Introduction de l’instance contentieuse :

. Délai de recours contentieux :

Le délai de deux mois prévu par le décret du 11 janvier 1965 ne s’applique pas aux demandes présentées en matières de travaux publics.
(C.E. Section 22 octobre 1976, société compagnie française Thomson-Houston-Hotchkiss-Brandt, req. 90993, Rec. Leb. p. 437).

Il en est ainsi même dans le cas où la victime a présenté une demande préalable à l’administration – ce dont il est dispensé en matière de dommages de travaux publics – et a reçu une décision de celle-ci.
(C.E. Section 26 mars 1976, Colboc, req. 88811, Rec. Leb. p. 184).

. Auteur du recours :

L’assureur de l’administration est subrogé dans les droits de son assuré mais aussi dans les droits des victimes qu’il a indemnisés. Il a par suite qualité pour rechercher la responsabilité d’une personne pour défaut d’entretien normal de l’ouvrage public dès lors que la victime était un usager de cet ouvrage.
(C.E. 12 novembre 1997, Cramaif, req. 159467, Rec. Leb. p. 417).

– Montant de l’indemnité :

. Faute de la victime entraînant une réduction de l’indemnité :

Si la victime du dommage a commis elle-même une faute (ne serait ce que d’inattention par la connaissance qu’elle pouvait avoir du danger), cette circonstance peut entraîner une réduction partielle ou totale de l’indemnité due par la collectivité. Ainsi un motocycliste qui empruntait quotidiennement depuis un mois la même portion de route présentant un danger “n’a pas fait preuve de toute la prudence nécessaire pour adapter la conduite de son véhicule aux dangers dont il connaissait l’existence” (un tiers du préjudice reste à sa charge).
(C.E. 17 mai 2000, département de la Dordogne, req. 164738, Rec. Leb. p. 177).

. Immeuble endommagé à la suite d’une rupture d’égout, ayant entraîné son évacuation :

L’indemnité versée est égale à la valeur vénale de l’immeuble. Les pertes de loyer peuvent être ajoutées pour la période comprise entre l’accident et le moment auquel l’étendue des dommages a été connue (en général dépôt du rapport d’expertise).
(C.E. 27 octobre 2000, commune de Nogent-sur-Marne, req. 198920, Rec. Leb. p. 480).

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