Principe
Traditionnellement, en vertu d’une jurisprudence très ancienne, le Conseil d’État, considĂ©rant que le règlement intĂ©rieur d’une assemblĂ©e telle que le conseil municipal Ă©tait une “mesure d’ordre intĂ©rieur”, d’ailleurs facultative, et qui ne concernait que lui mĂŞme, refusait d’examiner tout recours contentieux prĂ©sentĂ© contre un règlement intĂ©rieur, quels que soient les motifs allĂ©guĂ©s, et le dĂ©clarait irrecevable.
La loi du 6 fĂ©vrier 1992, en crĂ©ant un article L.121-10-1 du code des communes, a modifiĂ© les donnĂ©es du problème, dans la mesure oĂą elle a rendu obligatoire l’adoption d’un tel règlement pour les communes de 3 500 habitants et plus, et prĂ©vu que ce règlement pourrait faire l’objet d’un tel recours. Il restait Ă juger cependant si ce recours Ă©tait Ă©galement possible pour les communes non tenues Ă l’Ă©laboration d’un tel document, et pour toutes, quel pouvait ĂŞtre son contenu.
Sans doute inspirĂ© essentiellement de considĂ©rations pratiques le Conseil d’État a d’abord jugĂ© que le lĂ©gislateur avait bien eu l’intention d’ouvrir dĂ©sormais une telle possibilitĂ© de façon gĂ©nĂ©rale, tant il aurait Ă©tĂ© difficile de justifier que la nature juridique du règlement soit diffĂ©rente selon la dimension de la commune.
Quant au contenu du règlement, la rĂ©ponse Ă©tait plus facile dans la mesure oĂą toute personne juridique, directement ou par l’intermĂ©diaire de ses reprĂ©sentants, doit respecter le “bloc de lĂ©galitĂ©”, c’est Ă dire l’ensemble des lois et règlements qui s’imposent Ă tous.
Dans les deux espèces citĂ©es ci-dessous, le Conseil d’État a jugĂ© :
1°) – que le règlement intĂ©rieur pouvait :
a) – permettre au maire de demander “Ă toute personne qualifiĂ©e, mĂŞme Ă©trangère Ă l’administration, de donner des renseignements sur un ou plusieurs points faisant l’objet d’une dĂ©libĂ©ration”, mĂŞme si les dispositions des articles L.121-1 et suivants du code des communes prĂ©voient que seules les personnes ayant qualitĂ© de membre du conseil municipal peuvent participer aux dĂ©libĂ©rations de ce conseil. Il s’agit en effet d’une simple audition et non d’une participation ;
b) – reprendre intĂ©gralement des dispositions qui figurent dans la partie lĂ©gislative du code des communes (et certainement aussi dans la partie rĂ©glementaire, le fait de reprendre ces dispositions sans les altĂ©rer ou les modifier Ă©tant parfaitement lĂ©gal).
2°) – que le règlement intĂ©rieur ne pouvait pas aller Ă l’encontre des dispositions lĂ©gislatives ou rĂ©glementaires du code des communes ou d’autres textes :
a) – en laissant au maire le soin de dĂ©signer un secrĂ©taire de sĂ©ance, compĂ©tence qui, en vertu de l’article L.121-14 appartient au seul conseil municipal ;
b) – en autorisant le maire Ă rayer des procès-verbaux tous propos injurieux ou diffamatoires ainsi que toute dĂ©claration dont la publication serait de nature Ă engager la responsabilitĂ© communale, alors que l’article L.121-14 du code des communes a prĂ©vu que le procès-verbal des dĂ©libĂ©rations est rĂ©digĂ© par un conseiller municipal secrĂ©taire de sĂ©ance ou, sous son contrĂ´le, par les auxiliaires dĂ©signĂ©s Ă cette fin par le conseil municipal et qu’il est ensuite approuvĂ© par les conseillers municipaux prĂ©sents Ă la sĂ©ance (article L.121-14).
Jurisprudence
– Principe de possibilitĂ© d’un recours dirigĂ© contre le règlement intĂ©rieur et contenu de ce règlement :
Voir ci-dessus.
(C.E. Section, 10 février 1995, commune de Coudekerque-Branche, req. 147378, Rec. Leb. p. 68).
– Alsace-Lorraine : spĂ©cificitĂ©s du dĂ©roulement des sĂ©ances du conseil municipal :
En application de l’article L.181-11 du code des communes applicable aux communes des dĂ©partements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin (“Lors de chacune de ses sĂ©ances, le conseil municipal dĂ©signe son secrĂ©taire”), le conseil municipal ne peut dĂ©signer une personne pour assurer de façon permanente le secrĂ©tariat des sĂ©ances du conseil municipal. Le règlement intĂ©rieur qui prĂ©voit que le secrĂ©tariat est assurĂ© par le secrĂ©taire de mairie est donc entachĂ©e sur ce point d’illĂ©galitĂ©.
(C.E. Section, 10 février 1995, Riehl, req. 129168, Rec. Leb. p. 67).
[N.B. : la particularitĂ© consiste en ce que ce n’est pas obligatoirement un membre du conseil municipal qui est dĂ©signĂ© comme secrĂ©taire de sĂ©ance. Le secrĂ©taire de mairie peut donc assurer le secrĂ©tariat, mais Ă condition d’ĂŞtre dĂ©signĂ© Ă chaque sĂ©ance].