Principe
L’article L.2131-6 du C.G.C.T. prĂ©voit que le prĂ©fet dĂ©fère au tribunal administratif les actes soumis Ă l’obligation de transmission (art. L.2131-2 du C.G.C.T.) qu’il estime contraires Ă la lĂ©galitĂ© dans les deux mois suivant leur transmission. En vertu de l’article L.2131-8, toute personne lĂ©sĂ©e par un acte d’une collectivitĂ© territoriale peut, sans prĂ©judice du recours direct dont elle dispose, demander au prĂ©fet de dĂ©fĂ©rer l’acte au Tribunal.
La prĂ©sente fiche a pour objet de prĂ©ciser les règles applicables tant en matière de lĂ©galitĂ© que de responsabilitĂ© lorsque le prĂ©fet refuse ou s’abstient de dĂ©fĂ©rer un acte devant le tribunal administratif.
Jurisprudence
– Refus de dĂ©fĂ©rer un acte :
. Acte insusceptible de recours pour excès de pouvoir :
Si le prĂ©fet refuse de donner suite Ă une demande prĂ©sentĂ©e par une personne lĂ©sĂ©e de dĂ©fĂ©rer un acte au tribunal administratif, ce refus ne constitue pas une dĂ©cision susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.
(C.E. Section 25 janvier 1991, Brasseur, req. 80969, Rec. Leb. p. 23).
. Conséquence du refus :
Si la demande du tiers au prĂ©fet a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e dans le dĂ©lai du recours contentieux, elle a pour effet de proroger le dĂ©lai jusqu’Ă l’intervention d’une dĂ©cision explicite ou implicite par laquelle le prĂ©fet se prononce sur cette demande.
Ainsi :
–Â pour une mesure de police.
(C.E. Section 25 janvier 1991, Brasseur, précité).
–Â pour un permis de construire.
(C.E. 19 janvier 1994, SCI les Alpilles, req. 119275).
Cette solution est valable quelle que soit la qualitĂ© du tiers qui a saisi le prĂ©fet. S’il a la qualitĂ© de conseiller municipal, le dĂ©lai de recours formĂ© contre une dĂ©libĂ©ration Ă laquelle il a pris part commence Ă courir le jour de l’adoption de cet acte. Dans la mesure oĂą dans le dĂ©lai de 2 mois, il a adressĂ© sa demande au prĂ©fet, le dĂ©lai est interrompu Ă son profit jusqu’Ă la date de la dĂ©cision du prĂ©fet, laquelle fait courir un nouveau dĂ©lai de 2 mois.
(C.E. Section 23 avril 1997, ville de Caen, req. 151852, Rec. Leb. p. 158).
– ResponsabilitĂ© de l’Etat pour refus de dĂ©fĂ©rer du prĂ©fet ou abstention :
. Fondement de la responsabilité : faute lourde :
L’abstention d’un prĂ©fet de dĂ©fĂ©rer au tribunal administratif un acte d’une collectivitĂ© locale n’est susceptible d’engager la responsabilitĂ© de l’Etat que si cette abstention revĂŞt le caractère d’une faute lourde.
(C.E. 21 juin 2000, commune de Roquebrune-Cap-Martin, req. 202058, ment. Rec. Leb.).
. Mise en jeu de la responsabilité :
* Existence d’une faute lourde :
En s’abstenant pendant trois annĂ©es consĂ©cutives de dĂ©fĂ©rer au tribunal administratif neuf dĂ©libĂ©rations dont l’illĂ©galitĂ© ressortait avec Ă©vidence des pièces qui lui Ă©taient transmises et dont les consĂ©quences financières Ă©taient graves pour les communes membres du syndicat intercommunal ayant pris les dites dĂ©libĂ©rations, le prĂ©fet a commis compte tenu des circonstances particulières de l’espèce dans l’exercice du contrĂ´le de lĂ©galitĂ© qui lui incombai une faute lourde de nature Ă engager la responsabilitĂ© de l’Etat.
(C.E. 6 octobre 2000, commune de Saint-Florent, req. 205959, Rec. Leb. p. 395).
* Absence de faute lourde :
Le prĂ©fet ne commet pas de faute lourde en s’abstenant de dĂ©fĂ©rer un plan d’occupation des sols d’une commune sur le fondement duquel a Ă©tĂ© dĂ©livrĂ© un permis de construire qui sera annulĂ© en raison de son illĂ©galitĂ©.
(C.E. 21 juin 2000, commune de Roquebrune-Cap-Martin, précité).
. Partage de responsabilité :
Si la responsabilitĂ© de l’Etat est engagĂ©e en raison d’une faute lourde compte tenu des carences dans l’exercice du contrĂ´le de lĂ©galitĂ©, le prĂ©judice subi par les communes membres d’un syndicat intercommunal en raison de l’abstention du prĂ©fet Ă dĂ©fĂ©rer les dĂ©libĂ©rations de ce syndicat Ă l’Ă©vidence illĂ©gales n’est pas totalement indemnisĂ© par l’Etat en raison des fautes commises par les communes membres qui ont laissĂ© le bureau du syndicat, adopter les dĂ©libĂ©rations alors qu’il Ă©tait incompĂ©tent, et engager des dĂ©penses excessives impliquĂ©es par ces dĂ©libĂ©rations sans faire preuve de la vigilance qui leur incombait. En outre, les dĂ©lĂ©guĂ©s des communes au conseil municipal n’ont pas exercĂ© sur les membres du bureau les pouvoirs de contrĂ´le que la loi leur confĂ©rait et les conseils municipaux avaient approuvĂ© chaque annĂ©e les inscriptions budgĂ©taires importantes que ces dĂ©libĂ©rations impliquaient. La responsabilitĂ© de l’Etat a Ă©tĂ© limitĂ© Ă 1/5 du prĂ©judice subi par les communes qui s’Ă©levait Ă près de 14 millions de F.
(C.E. 6 octobre 2000, commune de Saint-Florent, précité).