Principe
Le maire est seul chargé de la police municipale et, notamment, d’assurer la “sûreté et la commodité du paysage dans les rues, quais, places et voies publiques” (art. L.131-2-1 du code des communes, devenu maintenant art. L.2213-23 du code général des collectivités territoriales). Ces attributions très larges concernent non seulement la circulation des véhicules au sens classique du terme mais également la réglementation du passage des animaux, le nettoiement, etc….
Le maire exerce également la police de la circulation sur les routes nationales, les chemins départementaux et les voies de communication, mais seulement à l’intérieur des agglomérations et sous réserve des pouvoirs dévolus au préfet sur les routes à grande circulation (art. L.131-3 du même code devenu maintenant article L.2213-1 du code général des collectivités territoriales).
Dans ces attributions, le maire agit en tant que représentant de l’Etat et donc sous le contrôle du préfet, qui peut d’ailleurs se substituer à lui en cas de carence.
Les mesures prises doivent être adaptées à l’objectif recherché, afin de concilier le principe de liberté de circulation et la sécurité des usagers riverains de la voie publique. Les interdictions générales ou trop étendues ne sont pas légales.
Jurisprudence
– Le conseil municipal n’a pas compétence pour règlementer la circulation :
Conseil municipal ayant, par une délibération, “décidé”, de limiter à 9 tonnes le poids total des véhicules empruntant un chemin départemental dans l’agglomération. Le maire, en signant le jour même un arrêté qui vise cette délibération et en exécute intégralement les dispositions, doit être regardé comme n’ayant pas usé lui-même de sa compétence en matière de police administrative, mais comme s’étant estimé lié par la délibération du conseil municipal et s’étant borné à en assurer l’exécution. (Annulation de l’arrêté).
(C.E. 31 janvier 1997, société Cochery-Bourdin-Chausse, req. 144797).
– Carrefour entre un chemin rural et une voie départementale : pouvoirs du maire :
Le maire de Villejust (Essonne) avait pris un arrêté interdisant aux véhicules d’un poids supérieur à 3,5 tonnes de tourner à gauche au débouché d’un chemin rural sur une route départementale. Annulation de cet arrêté au motif qu’il avait pour objet et pour effet de réglementer la circulation sur le chemin départemental dans une portion située hors d’une agglomération et avait été pris par une autorité incompétente.
(C.E. 1er mars 1993, Société entreprise Nabrin, req. 102785, Rec. Leb. p. 918).
– Illégalité d’une interdiction empêchant un propriétaire d’accéder à son domicile en voiture :
Par arrêté pris sur le fondement des articles L.131-2 à 131-4 du code des communes, le maire d’Ascain (Pyrénées-Atlantiques) avait interdit la circulation de “tous véhicules à moteur, cyclomoteurs compris, tous les jours et dans les deux sens” sur plusieurs voies communales et avait matérialisé cette interdiction par la pose de bornes enobstruant les entrées. Le Conseil d’Etat a jugé que, si le chemin faisant l’objet de cette interdiction se prêtait mal à la circulation et manquait de solidité en son assise, le maire ne pouvait édicter une réglementation ayant pour conséquence d’interdire à Mme G., seul propriétaire riverain ne disposant d’aucun autre accès à sa propriété, d’accéder en voiture à sa résidence. En n’exceptant pas l’intéressée du champ d’application de l’interdiction, l’arrêté attaqué l’avait assujettie à des contraintes excédant celles qui pouvaient légalement lui être imposées dans l’intérêt général.
(C.E. 6 décembre 1993, commune d’Ascain, req. 108991).
– Un principe : pas d’interdiction générale et absolue … :
Le maire de Bonneval-sur-Arc (73480) avait interdit pendant une période de dix jours au mois d’août, la circulation des poids lourds et des engins de travaux publics sur la voie en impasse qui permettait à une S.C.I. d’atteindre le chantier sur lequel elle avait entrepris la construction d’un ensemble immobilier de sept chalets. Le Conseil d’Etat a jugé que “les inconvénients présentés pour la tranquillité ou la sécurité des habitants de la commune et des vacanciers y séjournant par l’exécution des travaux de la société, ne présentaient pas, en l’espèce, un caractère de nature à justifier, alors même qu’elle était temporaire, la mesure d’interdiction générale et absolue” ainsi édictée.
(C.E. 10 décembre 1993, commune de Bonneval-sur-Arc, req. 118561).
– … sauf si l’interdiction générale et absolue est justifiée par la configuration des lieux :
Le maire de Montbrison (Loire) ayant interdit toute circulation automobile et tout stationnement dans un passage situé dans un lotissement reliant deux voies ouvertes au public et ayant fait poser des chicanes.
Le Conseil d’Etat a considéré que :
– en se fondant sur la destination uniquement piétonnière du passage, en raison de sa configuration, et sur les risques soulignés dans les pétitions qui lui avaient été adressée par les habitants du lotissement, le maire ne s’était pas basé sur des faits matériellement inexacts ;
– le requérant (un particulier habitant dans le lotissement) disposait d’une autre entrée sur une autre voie et n’était donc pas privé de l’accès à sa propriété auquel il était en droit de prétendre.
(C.E. 10 décembre 1993, Chalier, req. 112640).
– Mais une interdiction générale peut donner lieu à des dérogations dues à des circonstances particulières :
Le maire de l’île de Houat (Morbihan) avait rejeté implicitement la demande de M. M… sollicitant l’autorisation d’utiliser une “voiturette” pour ses déplacements sur l’île où il se rendait régulièrement en vacances. Le Conseil d’Etat a jugé qu’en refusant cette autorisation, alors que l’intéressé était atteint d’une grosse insuffisance coronarienne et qu’il lui était impossible de se déplacer sans assistance mécanique, le maire avait édicté une interdiction qui n’était pas justifiée par les troubles à l’ordre public que l’utilisation de la “voiturette” pouvait susciter. (Annulation pour excès de pouvoir).
(C.E. 10 décembre 1993, Maes, req. 107309, Rec. Leb. p. 918).
– La réglementation de la circulation peut ne pas concerner que des véhicules au sens strict (ici des cavaliers… ) mais obéit aux mêmes principes :
S’il appartenait au maire de Thiers-sur-Thève (Oise) de prendre toute mesure pour assurer la sécurité publique, notamment à la sortie des écoles, les dispositions de l’arrêté municipal réglementant la circulation équestre sur le territoire de la commune sont excessives du fait de la combinaison dans le même arrêté d’un itinéraire obligatoire et d’une interdiction absolue de passage à certaines heures sur une portion de cet itinéraire (de plus, existence d’une possibilité d’un autre tracé évitant l’école).
(C.E. 9 avril 1993, Touzery, req. 132366).