Pouvoir du maire : généralités

Principe

Le maire est dans l’obligation de prendre les mesures de police destinées à assurer le bon ordre, la tranquillité et le sécurité publique. Il exerce ces pouvoirs au nom de l’Etat, mais peut néanmoins déléguer une partie de ses pouvoirs à ses adjoints, ou en cas d’empêchement à des membres du conseil municipal (C.E. 4 janvier 1995, Metras, req. 110211).
Il doit adapter ces mesures à la situation particulière, en évitant toute interdiction générale et absolue, non justifiée ou entachée de détournement de pouvoir. Le maire n’est pas obligé d’agir, mais sa carence peut, dans certains cas, être constitutive d’une illégalité qui peut donner lieu à indemnisation.
L’évolution de la société fait que les maires ont été amenés ces dernières années à intervenir dans les domaines les plus divers (circulation des mineurs, prostitution, mendicité, circulation aérienne, O.G.M., etc…). La juridiction administrative se montre relativement favorable, sous réserve que les conditions générales mentionnés ci-dessus soient satisfaites.

Jurisprudence

– Arrêtés anti-culture transgénique :

Les essais en plein champ d’organismes génétiquement modifiés (OGM) font l’objet d’une contestation grandissante. Depuis le début de l’année, des dizaines de maires (notamment de la Sarthe) ont utilisé leur pouvoir de police pour interdire par arrêté municipal, les essais de cultures transgéniques entrepris sur le territoire de leur commune, sur le fondement du “principe de précaution”, et non du risque grave et localement circonstancié d’atteinte à la sécurité publique et à la salubrité publique.
A ce jour, aucune décision juridictionnelle n’est intervenue sur le fond. Deux ordonnances des juges des référés doivent cependant être signalées.
(T.A. Rennes 10 août 2001, req. 01.2191, suspension d’une délibération demandant à une société de mettre fin à un essai de maïs transgénique ; T.A. Nantes 8 novembre 2001, préfet de la Sarthe c/commune de Surfonds, req. 01.3752, suspension d’un arrêté municipal interdisant pendant trois ans les essais de cultures transgéniques sur tout le territoire de la commune).

– Arrêtés dits “couvre-feu” :

Un maire peut, pour protéger les mineurs de moins de 13 ans des dangers existants dans certains secteurs et à certaines heures (23 h à 6 h), prendre un arrêté municipal visant à faire reconduire à leur domicile, en cas d’urgence, les enfants concernés.
(C.E. ordonnance du 9 juillet 2001, req. 235638, pub. Rec. Leb.).
[Voir fiche : Restriction à la circulation des mineurs.]

– Le maire peut et doit :

– interdire pour des raisons de sécurité l’implantation de ruchers dans les zones urbaines.
(C.E. 26 juin 1991, Nassogne, req. 78111).

– faire cesser les nuisances sonores créées par un club de tir.
(C.E. 8 juillet 1992, ville de Chevreuse, req. 80775).

– ou les atteintes à la sécurité présentées par l’activité d’un tel club.
(C.E. 25 novembre 1992, Association “La Sarcelle”, req. 110000).

– interdire, pour des raisons de sécurité et de tranquillité, l’utilisation d’appareils d’aéromodélisme sur le territoire de la commune les dimanches et jours fériées toute la journée et les autres jours de la semaine après 18 heures pendant la période du 1er avril au 31 octobre.
(C.E. 8 mars 1993, commune des Molières, req. 102027).

– mettre en demeure les propriétaires co-lotis d’effectuer à leurs frais les travaux nécessaires pour remédier aux atteintes à la salubrité et à la sécurité publiques, résultant du manque d’entretien d’un réservoir d’eau d’un lotissement.
(C.E. 21 juin 1993, commune de Chauriat, req. 118491).

– réaliser la partie publique d’un raccordement d’un immeuble au réseau d’assainissement et inciter son propriétaire à effectuer ce raccordement.
(C.A.A. de Bordeaux, 16 avril 1992, Bronet, req. 90BX00586).

– élargir de 150 à 200 mètres le périmètre interdit à la chasse autour des habitations, compte tenu des atteintes déjà portées à la sécurité des habitations de la commune, alors même que la police de la chasse relève du préfet.
(C.E. 13 septembre 1995, fédération départementale des chasseurs de la Loire, req. 127553, Rec. Leb. p. 941).

– interdire un spectacle de “lancer de nain” comme portant atteinte à la dignité de la personne humaine.
(C.E. Assemblée, 27 octobre 1995, commune de Morsang-sur-Orge, req. 136727, Rec. Leb. p. 372).

– interdire toute activité sur un aérodrome d’U.L.M. car seul le préfet est compétent (article L.213-2 du code de l’aviation civile).
(C.E. 18 octobre 1995, commune de Bechy, req. 149179).

– ordonner, en l’absence d’urgence motivée par un péril imminent, l’enlèvement d’office et la mise en fourrière d’objets exposés sur la voie publique dans des conditions irrégulières, ainsi que de leurs supports, par des commerçants sur des éventaires fixes ou mobiles.
(C.E. 20 octobre 1995, commune de Saint-Tropez, req. 143804).

– Mais le maire peut légalement refuser :

– de prendre les mesures nécessaires pour assurer la tranquillité d’un habitant de la commune qui s’estimait gêné par les nuisances sonores émises par les troupeaux, alors que de telles nuisances devaient être considérées comme normales dans le cas d’espèce d’une commune rurale.
(C.E. 23 décembre 1987, Germain, req. 65970).

– d’ordonner la démolition d’une habitation et de prescrire des travaux de consolidation, alors que le bâtiment ne présentait pas, bien que situé sur un sol de nature crayeuse, un danger grave et imminent.
(C.E. 8 janvier 1993, Ferquin, req. 105948).

– La responsabilité de la commune peut être engagée pour avoir conservé une réglementation inadaptée ou n’avoir pas veillé à l’application d’une réglementation existante :

Les dégradations subies par la façade d’un immeuble, place du Tertre à Paris, provoquées par la présence et l’activité de portraitistes engagent la responsabilité de la ville de Paris en raison d’une réglementation inadaptée permettant à un très grand nombre d’artistes de s’installer sur des emplacements trop exigus et en raison de l’absence de mesures prises pour faire respecter cette réglementation ou de mesures ultérieures (faute lourde et condamnation à une indemnité de 75 000 F).
(C.E. 25 septembre 1992, S.C.I. “Le Panorama”, req. 94334).

– Le maire ne peut pas réglementer la circulation aérienne :

Des exercices de “tours de pistes” (enchaînement à basse altitude de décollages et atterrissages) d’avions d’écoles de pilotages, sont nécessaires à la formation des élèves-pilotes et se rattachent à la circulation aérienne générale, laquelle relève de la compétence du ministre chargé de l’aviation civile, seul à même de prescrire les mesures nécessaires à la sécurité. L’existence de ce pouvoir de police spéciale exclut pour le maire la possibilité d’user des pouvoirs de police qu’il tient des articles L.2212-1 et L.2212-2 du C.G.C.T. pour réglementer les évolutions des avions au dessus de sa commune.
(C.E. 19 avril 2002, ministre de l’équipement, des transports et du logement, req. 238212).

Laisser un commentaire