Droit à sépulture dans le cimetière communal

Principe

Le cimetière constitue une dépendance du domaine public communal dont le contentieux relève de la juridiction administrative (C.E. 28 juin 1935, Marecar, Rec. Leb. p. 734), mais la juridiction judiciaire est compétente en ce qui concerne le droit de l’utilisation des sépultures familiales et les vols ou autres délits commis dans ces sépultures. Chaque commune est tenue de consacrer un ou plusieurs terrains à cet effet article L.2223-1 du C.G.C.T.
L’article L.2223-3 du C.G.C.T. (inchangé depuis 1889) prévoit que la sépulture est due dans le cimetière communal aux personnes décédées sur le territoire de la commune, quel que soit leur domicile, aux personnes domiciliées dans la commune quel que soit leur endroit de décès et aux personnes qui y ont une sépulture de famille.
Il s’agit là de l’inhumation de droit commun (dit en “service ordinaire” en “terrain ordinaire” ou en “terrain commun”). Cette forme d’occupation du domaine public peut disparaître au bout de cinq ans minimum (article R.31-8 du code des communes) par une “reprise d’emplacement” par la commune, qui peut alors l’utiliser pour une autre inhumation.
La notion de domicile dans la commune ouvrant droit à inhumation dans le cimetière communal est appréciée assez libéralement depuis une jurisprudence (C.E. 25 juin 1948, Plisson, Rec. Leb. p. 294) jamais démentie, qui avait estimé que disposait un tel droit une personne qui avait vécu dans le village “la plus grande partie de sa vie”.
Il est possible d’installer sur cet emplacement une pierre sépulcrale ou tout autre monument (art. L.2223-12 du C.G.C.T. : C.E. 23 juin 1991, Téoule, Rec. Leb. p. 714).

Jurisprudence

– Le droit à sépulture subsiste même si le caveau de famille ne peut plus recevoir de corps :

Le refus du maire d’accepter l’inhumation d’une personne, qui n’était décédée ni domiciliée sur le territoire de la commune, ne peut pas se fonder sur le fait que le caveau bâti sur la concession familiale initiale ne permettait plus d’accueillir de nouveaux corps et qu’il aurait donc fallu envisager cette inhumation dans un autre endroit du cimetière.
(C.E. 5 décembre 1997, commune de Bachy, req. 112888, conclusions de D. Piveteau, Rec. Leb. p. 463).

– Le maire peut faire déplacer une stèle dans un but de sécurité publique :

Le maire de Vouthon-Bas (Meuse) avait décidé de faire déplacer de quatre-vingt centimètres la stèle de granit placée à l’avant d’une tombe ainsi que la plaque portant le nom du défunt. Eu égard à la position initiale de ce monument, au pied même de l’escalier conduisant à l’église paroissiale, la mesure prise par le maire a été décidée légalement sur le fondement de l’article L.2212 du C.G.C.T. (ancien article L.131-2 du code des communes) dans un but de sécurité publique.
(C.E. 24 mars 1997, Collombat, req. 165273).

– Inhumation dans une sépulture d’une personne étrangère à la famille :

L’affectation familiale d’une sépulture fait obstacle à l’inhumation d’une personne étrangère à la famille du fondateur, en l’absence du consentement de tous les ayants droit de ce dernier. La personne propriétaire de la maison familiale avait autorisé l’inhumation de son locataire dans ce caveau. Le cour d’appel avait confirmé cette autorisation à tort, sans rechercher si cette personne était unie au fondateur du caveau par un lien familial lui donnant qualité pour accorder cette autorisation.
(Cass. Civ. 1ère C., 15 mai 2001, Sainte-Marie).

– Responsabilité pénale des fossoyeurs :

Des fossoyeurs qui se sont appropriés, dans l’exercice de leurs fonctions, des débris d’or et de bijoux au cours de nettoyage de fosses communes et de concessions non renouvelées, ainsi que dans des caveaux et cercueil, se sont rendus coupables de vols par personne chargée d’une mission de service public. Les prévenus ont été considérés comme sachant que les objets qu’ils récupéraient appartenaient aux familles ou aux défunts, de sorte qu’ils ne pouvaient se prévaloir de leur bonne foi, pour éviter la qualification de vol (confirmation de la condamnation prononcée par la cour d’appel, mais l’interdiction définitive d’exercer une fonction publique est cassée et ramenée à cinq ans).
(Cass. Crim. 25 octobre 2000, A., arrêt n° 6400 P. + F.).

– Principe du respect dû aux sépultures :

Toute action illégale contre les corps entreposés dans une sépulture relève de la voie de fait (juge judiciaire), alors qu’une simple atteinte à une concession ou une partie de concession inutilisées pour une inhumation ne constitue qu’une emprise irrégulière. La Cour de Cassation pose ainsi le principe du respect dû aux sépultures, méconnu dès lors qu’il y a “atteinte au cadavre” conservé dans la concession.
(Cass. Civ. 29 mai 2001, Camy, 937P).

– Interdiction de la conservation par cryogénisation du corps d’une personne défunte :

Le droit de toute personne d’avoir une sépulture et de régler librement, directement ou par l’intermédiaire de ses ayants droit, les conditions de ses funérailles préalablement à son inhumation. Dans ces conditions, une demande de cryogénisation doit être interprétée comme une demande de conservation et non d’inhumation. Le préfet avait donc compétence liée pour refuser l’autorisation sollicitée.
(C.E. 29 juillet 2002, Leroy, req. 222180, pub. Rec. Leb.).

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