Principe
Une dĂ©libĂ©ration du conseil municipal (ou de l’organe dĂ©libĂ©rant d’un groupement de communes) peut faire l’objet d’un recours en excès de pouvoir devant le tribunal administratif territorialement compĂ©tent, sous certaines conditions de forme et de dĂ©lai.
Elle peut être attaquée :
– soit par un habitant de la commune et, plus gĂ©nĂ©ralement par toute personne dont un intĂ©rĂŞt a Ă©tĂ© lĂ©sĂ© par cette dĂ©libĂ©ration ;
–Â soit par un conseiller municipal ;
– soit par le prĂ©fet dans l’exercice de son contrĂ´le de lĂ©galitĂ©.
La dĂ©libĂ©ration doit ĂŞtre dĂ©fĂ©rĂ©e dans un dĂ©lai de deux mois après que l’intĂ©ressĂ© en ait eu connaissance, mais le point de dĂ©part de ce dĂ©lai est apprĂ©ciĂ© diffĂ©remment selon le requĂ©rant :
– un particulier a deux mois pour agir après affichage de la dĂ©libĂ©ration ou après la notification individuelle qui lui en a Ă©tĂ© faite ;
– pour un conseiller municipal, le dĂ©lai court dès la sĂ©ance du conseil municipal au cours de laquelle cette dĂ©libĂ©ration a Ă©tĂ© votĂ©e ;
– le prĂ©fet dispose de ce dĂ©lai de deux mois après rĂ©ception Ă la prĂ©fecture (ou Ă la sous-prĂ©fecture) de la dĂ©libĂ©ration qui lui est transmise pour l’exercice de son contrĂ´le de lĂ©galitĂ©.
Toutes les dĂ©libĂ©rations ne peuvent cependant pas ĂŞtre attaquĂ©es. Seules les dĂ©libĂ©rations entraĂ®nant ou pouvant entraĂ®ner directement une modification de l’ordonnancement juridique peuvent faire l’objet d’un recours. Tel est le cas de toutes les dĂ©libĂ©rations, quel qu’en soit leur objet (mĂŞme si elles portent par exemple sur la gestion du domaine privĂ© de la commune) qui ont le caractère d’un acte administratif.
Jurisprudence
– DĂ©libĂ©rations Ă caractère prĂ©paratoire des collectivitĂ©s territoriales ou de leurs Ă©tablissements publics :
Les dĂ©libĂ©rations Ă caractère prĂ©paratoire des collectivitĂ©s territoriales et de leurs Ă©tablissements publics ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, mĂŞme Ă raison des vices propres dont elles seraient entachĂ©es (abandon de l’ancienne jurisprudence Tete, Rec. Leb. p. 179). Toutefois les dispositions de la loi du 2 mars 1982 font exception Ă cette règle en faveur du prĂ©fet, qui est ainsi recevable Ă dĂ©fĂ©rer de telles dĂ©libĂ©rations au juge administratif.
(C.E. Assemblée 15 avril 1996, Syndicat C.G.T. des hospitaliers de Bédarieux, req. 120273, Rec. Leb. p. 130).
– Absence de notification d’une dĂ©libĂ©ration Ă caractère individuel : pas de dĂ©lai pour agir pour les personnes concernĂ©es :
DĂ©libĂ©ration du conseil municipal fixant le montant de la redevance due par des particuliers pour une occupation du domaine privĂ© de la commune. MĂŞme si elle a fait l’objet d’un affichage rĂ©gulier, une telle dĂ©libĂ©ration prĂ©sentait Ă l’Ă©gard des particuliers concernĂ©s le caractère d’une dĂ©cision individuelle
et devait leur ĂŞtre notifiĂ© personnellement. En l’absence d’une telle notification, les particuliers concernĂ©s Ă©taient recevables Ă l’attaquer sans condition de dĂ©lai devant le tribunal administratif.
(C.E. 28 février 1996, commune de Chouz, req. 155159).
– Le dĂ©lai pour agir d’un conseiller municipal part de la date de la sĂ©ance du conseil municipal, mĂŞme s’il n’y assistait pas :
Le dĂ©lai imparti Ă un conseiller municipal pour attaquer une dĂ©libĂ©ration du conseil municipal part de la sĂ©ance Ă laquelle il a Ă©tĂ© rĂ©gulièrement convoquĂ©, mĂŞme s’il n’y a pas assistĂ©.
(C.E. 24 mai 1995, ville de Meudon, req. 150360, Rec. Leb. p. 208).
– PrĂ©sentent le caractère de dĂ©libĂ©rations non susceptibles de recours :
1°) – une dĂ©libĂ©ration approuvant un programme prioritaire de travaux Ă rĂ©aliser dans un dĂ©lai de dix ans et dĂ©cidant d’entreprendre les travaux nĂ©cessaires.
(C.E. 8 juillet 1996, Etablissement public d’amĂ©nagement de la Loire et de ses affluents (EPALA), req. 108054).
2°) – première dĂ©libĂ©ration ayant manifestĂ© l’intention d’acquĂ©rir des biens immobiliers, puis, les vendeurs ayant subordonnĂ© cette vente Ă l’acceptation d’une condition relative Ă l’institution d’une servitude de passage tous usages, deuxième dĂ©libĂ©ration ayant mis fin Ă l’offre d’achat. De telles dĂ©libĂ©rations qui se bornent Ă formuler une offre puis Ă y mettre fin lorsqu’elle n’est pas acceptĂ©e, ne constituent pas des dĂ©cisions susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.
(C.E. 3 avril 1998, S.N.C. du Château, req. 156278, Rec. Leb. p. 769).
3°) – dĂ©libĂ©ration Ă©mettant un avis sur les propositions faites par le conseil gĂ©nĂ©ral sur l’amĂ©nagement d’une route dĂ©partementale sur le territoire de la commune.
(C.E. 5 décembre 2001, Compin, req. 217638).
– Effet de l’inexistence d’une dĂ©libĂ©ration :
DĂ©libĂ©ration ayant dĂ©cidĂ© de transformer un emploi en prononçant l’intĂ©gration dans cet emploi et ayant Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©e nulle et de nulle effet par le Conseil d’Etat. Sont Ă©galement nulles et de nul effet les dĂ©cisions prises en application de cette “dĂ©libĂ©ration”. Le juge administratif est tenu de constater cette nullitĂ© Ă toute Ă©poque, mĂŞme si les recours contre un tel acte ont Ă©tĂ© introduits après expiration du dĂ©lai.
(C.E. 10 novembre 1999, préfet de la Drôme, req. 126322, Rec. Leb. p. 940).
[Attention : il s’agit ici d’une dĂ©libĂ©ration “inexistante”, c’est Ă dire prise hors de la compĂ©tence du conseil municipal, et non pas d’une simple dĂ©libĂ©ration illĂ©gale].