Associations : rapports avec la commune

Principe

Les communes font de plus en plus souvent appel à des associations loi de 1901 (dont éventuellement elles suscitent la création) pour effectuer un certain nombre de tâches. Une telle solution présente l’avantage au moins apparent d’une commodité plus grande de gestion dans les mesures où les contraintes (mais aussi les garanties) des règles de la comptabilité publique sont écartées.
Il ne doit être fait appel à des associations que pour des tâches bien définies, limitées et contrôlées par la commune.
Il apparait très souvent que c’est dans le domaine social et éducatif que se développe l’action d’associations subventionnées par la commune. La jurisprudence récente semble laisser une très grande souplesse sur la forme de l’aide communale qui, indépendamment d’une subvention, peut être la prise en charge d’un déficit ou la cession de biens communaux à faible prix.

Jurisprudence

– Élu intéressé par suite de sa participation à une association :

Le maire étant également président de l’association “Léo Lagrange Jeunesse et Tourisme” (qui, malgré son absence de but lucratif, poursuivait des objectifs qui ne se confondaient pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune) doit être considéré comme intéressé à la délibération autorisant la signature du bail d’un immeuble communal avec cette association.
(C.E. 16 décembre 1994, commune d’Oullins, req. 145370, Rec. Leb. p. 559).

– Une association étroitement contrôlée par la commune ne peut pas échapper totalement à un contrôle du juge administratif :

. Ses comptes peuvent être considérés comme des documents administratifs :

– une association, chargée des centres de loisirs, garderies, ateliers et clubs communaux ainsi que de diverses missions culturelles et socio-éducatives, percevant des aides directes de la commune (plus de la moitié de ses recettes) et indirectes et, de plus, étroitement contrôlée par elle, doit être regardée comme gérant un service public communal, alors même qu’elle ne bénéficie pas de prérogatives de puissance publique. De ce fait, les comptes de cette association sont des documents administratifs, soumis à l’article 2 de la loi du 17 juillet 1978 et, à ce titre, communicables aux personnes qui en font la demande.
(C.E. 20 juillet 1990, ville de Melun, req. 69867 et 72160).

. Les décisions du maire la concernant peuvent être considérées comme des décisions administratives :

– association servant seulement d’intermédiaire pour le paiement d’une indemnité versée (illégalement) par le maire au directeur de la piscine, indemnité financée par une subvention de la commune. dans ces conditions, une lettre du maire faisant savoir au président de l’association qu’il n’y avait plus lieu de continuer à verser l’indemnité de M. R… avait le caractère d’une décision faisant grief qui pouvait être déféré au juge administratif.
(C.E. 11 mars 1991, Rivellini, req. 81697).

– Une commune ne peut déléguer à une association que des attributions limitées, bien définies et contrôlées par les élus :

– pour gérer un lieu de rencontres, de concerts et de spectacles (qui correspondent à des activités de service public), la commune peut faire légalement appel à une association à qui elle versera une subvention et à la disposition de laquelle elle mettra des locaux communaux, dès lors que les droits et obligations de cette association se trouvent strictement définis par une convention prévoyant un contrôle étroit et permanent de la commune, qui permet notamment le contrôle des élus sur les fonds publics affectés à cette association.
(C.E. 8 juin 1994, Delrez, req. 143272, Rec. Leb. p. 839).

– une collectivité publique ne peut pas légalement transférer à une association, dont elle a suscité la création, l’exercice de compétences qui lui appartenaient en propre, dont elle s’était globalement déchargée sur une personne de droit privé. Cette collectivité ne peut pas non plus exercer ses compétences sous le couvert d’une structure de droit privé comme une association (arrêt rendu à propos d’un département mais transposable aux communes).
(C.E. 27 mars 1995, chambre d’agriculture des Alpes-Maritimes, req. 108096, Rec. Leb. p. 142).

– Local mis à la disposition d’une association : compétences respectives du conseil municipal et du maire :

1°) – le conseil municipal peut déterminer éventuellement par ses délibérations les conditions générales dans lesquelles un local communal peut être mis à la disposition d’une association, mais il appartient au maire seul, conformément à l’article L.122-19-1 du code des communes (devenu article L.2122-21 du code général des collectivités territoriales) de faire une application individuelle d’une telle délibération.
(C.E. 12 octobre 1994, commune de Thun-l’Evêque, req. 141851).
[N.B. : il est rappelé que les délibérations à caractère réglementaire concernant notamment les principes généraux d’utilisation des biens de la commune relèvent de la compétence du conseil municipal, mais que les décisions individuelles d’application doivent être prises par le maire. En l’absence de délibération, le maire est seul compétent pour décider des modalités de mise à disposition d’un local à une association].

2°) – le maire ne peut pas demander la liste des adhérents d’une association, mais seulement les documents présentant l’activité de cette association subventionnée (comptes, statuts…), sous peine de méconnaître le principe de la liberté d’association.
(C.E. 28 mars 1997, Solana, req. 182912).

3°) – le refus de mettre un local à disposition d’une association ne peut être fondé sur des raisons politiques et le fait que l’association présente un caractère politique.
(C.E. 30 avril 1997, commune de Montsoult, req. 157115).

– Le but poursuivi par l’association ne doit pas être étranger aux affaires de la commune :

En accordant son soutien financier à l’association de défense contre les déchets nucléaires, dont l’objet est de faire obstacle aux études conduites par l’agence nationale des déchets radioactifs en vue de la recherche d’un site de stockage de déchets nucléaires, le conseil municipal est intervenu dans un domaine étranger aux affaires de la commune et a excédé les pouvoirs qu’il tient de l’article L.121-6 du code des communes (devenu article L.2121-38 du code général des collectivités territoriales).
(C.E. 15 novembre 1995, commune de Secondigny, req. 137500).

– Information des conseillers municipaux sur le budget des associations subventionnées :

Le refus du maire de porter à la connaissance d’un conseiller municipal qui l’avait demandé les budgets des associations subventionnées par la commune fournis par ces dernières amène à considérer que les conseillers municipaux n’ont pas été suffisamment informés avant le vote du budget. La délibération approuvant le budget et l’attribution de subventions à des associations doit être regardée comme ayant été adoptée selon une procédure irrégulière.
(C.E. 2 février 1996, commune d’Istres, req. 155883 ; C.E. 31 mai 2000, Association Strasbourg Musique et Congrès, req. 182012).

– Prise en charge du passif d’une association :

Une association qui jouait le rôle d'”Office culturel” de la commune avait subi un déficit important après l’organisation de deux soirées chorégraphiques. Le Conseil d’État a jugé que ce déficit avait pu être pris en charge par la commune dans la mesure où l’association était une émanation de celle-ci et avait agi pour le développement culturel et touristique de la commune.
(C.E. 4 août 2006, commune de Grimaud, 271964, ment. Rec. Leb.).

– Cession de terrains appartenant au domaine privé de la commune à un prix très inférieur à leur valeur :

La différence très importante entre le prix de cession d’un ensemble immobilier constitué par un ancien stade (35 000 euros pour une estimation de 137 500 euros) et l’appréciation des Domaines avait entrainé l’annulation en premier instance et en appel de la délibération du conseil municipal de Mer (Loir-et-Cher).

Le Conseil d’État a infirmé ces deux juridictions en considérant que cette différence devait être regardée comme ayant le caractère d’une aide apportée par la commune à l’association franco-turque de Mer et à l’association socio-culturelle, éducative et sportive des jeunes turcs de Mer, dont l’objet statutaire et de favoriser l’intégration de la population d’origine turque dans la commune par la création d’activités culturelles, sociales, éducatives et sportives. Cette aide était d’une part apportée aux associations pour un double motif d’intérêt général invoqué par la commune et tendant tant à une meilleures insertion des habitants d’origine étrangère au sein de la commune par la création d’activités collectives qu’au renforcement de la sécurité publique notamment pour la circulation en centre ville. D’autre part, elle avait eu pour contreparties suffisantes de permettre à ces associations de mener à bien, dans le cadre de leurs statut, leurs projets et de disposer d’un lieu de réunion adapté à la réalisation de ceux-ci par sa dimension et ses accès.

Dans une rédaction de principe, le Conseil d’État considère que si la liberté reconnue aux collectivités territoriales d’accorder certaines aides ou subventions à des personnes privées pour des motifs d’intérêt général ne peut légalement s’exercer que dans le cadre de principe constitutionnels, la cession par une commune d’un terrain à une association locale pour un prix inférieur à sa valeur ne saurait être regardée comme méconnaissant le principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder une élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant des fins d’intérêt privé lorsque la cession est justifiée par des motifs d’intérêt général, et comporte des contreparties suffisantes.
(C.E. 25 novembre 2009, commune de Mer, 310208, pub. Rec. Leb.).

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