Principe
Un agent public en situation irrégulière qui ne reprend pas son service après l’envoi d’une mise en demeure de rejoindre son poste rompt de sa propre volonté le lien qui l’unit à l’administration. Que l’agent soit titulaire ou non titulaire (stagiaire, contractuel), l’autorité administrative est alors fondée à procéder à sa révocation sans que l’intéressé puisse prétendre aux garanties offertes par la procédure disciplinaire.
Jurisprudence
– Nécessité d’une absence :
En principe, le refus d’assurer son service tout en étant présent sur les lieux de travail ne constitue pas un abandon de poste.
(C.E. 27 février 1981, Mlle Yaffi, Rec. Leb. p. 118).
Il en est de même lorsque l’agent régulièrement présent refuse d’assurer le travail qui lui est demandé
(C.E. 4 janvier 1985, ville du Trait, req. 50840).
Ou lorsqu’il n’accepte pas d’effectuer une mission temporaire qui lui est confiée.
(C.E. 25 février 1998, centre de gestion de la fonction publique territoriale de Seine-Maritime, req. 171018, Rec. Leb. p. 908).
Ou lorsqu’à l’issue d’un congé de maladie, il refuse sa nouvelle affectation mais se présente sur son lieu de travail.
(C.E. 4 juillet 1997, Boucetta, req. 176360, Rec. Leb. p. 908).
Cependant, cette solution n’est pas retenue lorsque la présence sur le lieu de travail est motivée par des considérations étrangères au service. Ainsi, un surveillant de travaux au service des sports d’une commune qui n’effectue plus le service d’entretien des installations sportives depuis plusieurs semaines est légalement révoqué pour abandon de poste dès lors que, s’il soutient avoir fait acte de présence sur son lieu de travail, cette présence d’ailleurs occasionnelle était uniquement consacrée à son entraînement sportif personnel et était étrangère à ses obligations de service.
(C.E. 9 novembre 1992, commune de Montataire, req. 105364).
– Nécessité d’une absence irrégulière :
. Agent incarcéré :
L’absence d’un agent à son travail en raison de son incarcération ne peut être assimilée à un abandon de poste.
(C.E. 18 février 1998, commune de Charenton-le-Pont, req. 82883).
. Agent dont le congé régulier est contesté :
Lorsque l’agent est parti régulièrement en congé, la lettre adressée par son employeur le lendemain du début de ce congé et invitant l’agent à reprendre ses fonctions à une date déterminée ne peut avoir le caractère d’une mise en demeure de reprendre le service, laquelle doit être adressée à la suite du constat de l’absence irrégulière de l’intéressé.
(C.E. 29 décembre 1995, Kavvadias, req. 129659, Rec. Leb. p. 477).
. Agent en congé de maladie :
L’agent doit être effectivement en situation d’absence irrégulière. Ainsi, lorsqu’en congé de maladie il a adressé un certificat médical attestant son inaptitude à la reprise de son travail, l’autorité administrative qui a reçu ce certificat avant l’expiration de ce congé ne peut le regarder comme ayant été en situation d’abandon de poste lorsque l’intéressé n’a pas repris ses fonctions en dépit d’une mise en demeure, dès lors qu’aucune pièce du dossier n’attestait son aptitude à reprendre son travail. Certes, le maire de la commune avait fait procéder à une contre-visite médicale par un médecin assermenté, mais il n’avait pas produit devant le juge les conclusions de cette expertise. De ce fait, l’agent ne pouvait être regardé comme étant en situation d’absence irrégulière; la décision du maire de le radier pour abandon de poste était illégale.
(C.E. 22 février 1993, Commune de La Valette-du-Var, req. 105806).
Si l’agent se soustrait volontairement à la contre-visite, ce comportement ne peut être regardé comme ayant entraîné la rupture du lien avec le service.
(C.E. 12 avril 1995, O.N.F., req. 151517).
. Agent absent pour effectuer un don du sang :
De même l’agent qui s’absente sans autorisation pour effectuer un don du sang ne peut être regardé du fait de cette absence irrégulière comme ayant entendu rompre le lien l’unissant à la commune même s’il a fait l’objet de plusieurs mises en garde.
(C.E. 25 février 1994, commune d’Issy-les-Moulineaux, req. 112735).
. Agent en grève :
Un agent participant à un mouvement de grève ne peut être radié des cadres pour abandon de poste même si cette grève a été déclenchée en violation de la règle imposant un préavis de 5 jours francs à l’employeur. Cette circonstance ne fait pas perdre aux agents en grève les garanties de la procédure disciplinaire qui doit être mise en Å“uvre alors même que l’employeur leur a adressé une mise en demeure de reprendre le travail.
(C.E. 25 avril 2001, Mme Malody, req. 191544).